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Un éclairage nouveau sur les atteintes du foie dans la mucoviscidose

Une étude française au long cours, financée notamment par Vaincre la Mucoviscidose, apporte un éclairage nouveau sur les atteintes du foie, mal connues jusqu’à présent chez les patients atteints de mucoviscidose. Elle fournit aussi des données sur l’effet à long terme du traitement contre ces complications hépatiques.

Dernière mise à jour 07.09.2018 à 10h30

foiehepatology

La mucoviscidose est une maladie génétique grave, qui touche près de 7 000 patients en France. La pathologie atteint principalement les poumons et l’appareil digestif, mais également d’autres organes, comme le foie.

Il existe différents types de lésions du foie (lésions hépatiques) et des voies biliaires chez les patients atteints de mucoviscidose. Ces lésions sont liées à l’obstruction des canaux par la bile épaissie. Elles peuvent aboutir à une cirrhose, elle-même responsable d’une hypertension portale, autrement dit de troubles de la circulation sanguine dans la veine dite " porte " qui irrigue le foie.

L’acide ursodésoxycholique est utilisé depuis une dizaine d’années pour tenter de prévenir l’apparition de complications hépatiques chez les patients atteints de mucoviscidose. Il s’agit d’un médicament sous forme de comprimés qui est prescrit, de manière générale et pas uniquement dans la mucoviscidose, pour dissoudre les calculs biliaires et traiter certaines maladies chronique du foie.

L’atteinte du foie mal connue jusqu’à présent

Les déterminants et les traitements associés à cette atteinte du foie sont encore mal connus dans la mucoviscidose. Mais l’étude publiée fin juillet 2018 dans Hepatology vient apporter un éclairage nouveau sur le sujet.

L’étude, cofinancée par Vaincre la Mucoviscidose, a été menée par des équipes hospitalo-universitaires (Sorbonne université et Assistance publique-hôpitaux de Paris, AP-HP) du centre de recherche Saint-Antoine (Institut national de la santé et de la recherche médicale, Inserm U938) et de l’Institut Pierre Louis d’épidémiologie et de santé publique (Inserm 1136).

Les auteurs de la publication ont analysé les données, collectées sur plusieurs années, de 3 328 patients atteints de mucoviscidose avec une atteinte du pancréas.

Une étude inscrite dans un programme plus large

Les résultats de cette étude s’inscrivent dans le programme national de recherche des gènes modificateurs de la mucoviscidose, qui a démarré en 2006. Les " gènes modificateurs " de la mucoviscidose sont des gènes, autres que le gène CFTR responsable de la mucoviscidose, qui pourraient expliquer l’hétérogénéité clinique de la pathologie.

Ce programme implique l’ensemble des centres de ressources et de compétences de la mucoviscidose (CRCM) en France. Il a permis d’assembler l’une des plus grandes cohortes (groupes) de patients atteints de mucoviscidose au monde, avec plus de 4 800 patients concernés, et les inclusions continuent. Pour chaque patient, de l’ADN est extrait et stocké dans une banque nationale et les données cliniques sont recueillies par un attaché de recherche clinique financé par l’association Vaincre la Mucoviscidose.

Un outil de recherche extraordinaire

Au-delà de son objectif primaire d’étudier les gènes modificateurs, cette cohorte constitue un outil extraordinaire pour les chercheurs. Les principaux résultats publiés sur Hepatology sont les suivants :

  • Les manifestations hépatiques touchent plus de 40 % des patients, sans limite d’âge ;

  • Près de 10 % des patients ont des complications hépatiques graves ;

  • Les facteurs associés à une maladie hépatique plus précoce sont le sexe masculin, la présence de la mutation F508del (la plus fréquente des mutations du gène CFTR, à l’origine de la mucoviscidose) et la présence d’une obstruction intestinale néonatale (à la naissance) appelée " iléus méconial " ;

  • L’usage de l’acide ursodésoxycholiquene ne montre pas d’impact sur la survenue de manifestations telles que la cirrhose et l’hypertension portale.

Des idées reçues à revoir

Si l’espérance de vie des patients atteints de mucoviscidose n’était que de 5 ans en 1960, elle atteint aujourd’hui plus de 40 ans grâce aux progrès de la recherche et de la prise en charge. Par conséquent, plus de la moitié des patients suivis dans les CRCM français sont dorénavant des adultes. Ainsi, certaines idées reçues seront très certainement revisitées dans les années futures.

Dans ce travail, la taille importante de la cohorte et son suivi prospectif sur plus de 10 ans contredit l’idée reçue que l’atteinte hépatique ne se développerait que dans l’enfance, l’incidence (le nombre de nouveaux cas) continuant en effet à augmenter avec l’âge des patients.

Ces résultats vont très probablement ouvrir le débat auprès des spécialistes, notamment sur l’intérêt d’un traitement par acide ursodésoxycholique. Ils soulignent l’importance de rechercher de nouveaux traitements qui pourraient prévenir les complications hépatiques et/ou ralentir la progression de la maladie hépatique dans la mucoviscidose. Dans cette attente, pour les patients concernés, il est évident que le traitement et la prévention des atteintes du foie est à discuter avec leur médecin.

Pour accéder à l’actualité sur le sujet mise en ligne par l’Inserm Ile-de-France, cliquez ici.

Crédit illustration © yodiyim Fotoli